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Abattoir du Vigan - Les questions
jeudi 25 février 2016, par
Une vidéo de quelques minutes, diffusée sur les réseaux sociaux, a provoqué un séisme médiatique en dénonçant des faits de maltraitance animale à l’abattoir intercommunal du Pays Viganais.
Après Alès, Le Vigan
Venant peu de temps après les révélations de l’association des anti-viande L214 Éthique & Animaux sur les conditions déplorables d’abattage aux abattoirs d’Alès la vidéo tournée clandestinement dans les installations de ceux du Vigan n’en est pas moins édifiante sur des pratiques scandaleuses et des maltraitances infligées aux animaux dont d’ailleurs les éleveurs locaux eux-même ont été très choqués.
Cet abattoir a été fermé dès que les faits sont venus à la connaissance des élus de la communauté de communes et tout le personnel a été suspendu en attendant le résultat de l’enquête administrative qui va être menée. Une plainte pour maltraitance a été déposée par l’association L214 ainsi que par la municipalité du Vigan pour les mêmes motifs.
Des réactions très vives, sous le coup d’une grande émotion, de la part des professionnels de la filière et des élus les ont amené à une condamnation unanime de ces faits de maltraitance. La mairie du Vigan et la maison de l’Intercommunalité ont été assaillies de courriels et de coup de fils de personnes indignées, à juste titre peut-être, mais qui s’en sont prises sans discernement aucun aux élus en termes qui allaient parfois jusqu’à l’insulte ou la menace.
L’affaire, médiatisée à fond, a pris une ampleur nationale, remontant au ministère et faisant réagir la SPA et Brigitte Bardot dans un même élan d’indignation partagée.
Notre ville du Vigan, qui comme tant d’autres cités de la ruralité, essaye de surmonter de multiples difficultés tout en restant malgré tout attractive n’avait vraiment pas besoin de ça !
Abattage tabou
La culture du paradoxe est à la France en matière de consommation de produits carné, ce que la culture du riz est aux asiatiques. Incontournable !
97,7% des français consomment de la viande malgré le fait que 29% seulement d’entre eux en soient de gros consommateurs (Plus de 490 gr/semaine) et une tendance générale à la baisse.
Par contre il existe un tabou sur les conditions d’élevage et d’abattage. Conditions qu’un consommateur lambda ne tient pas particulièrement à connaître, même en dehors de toute maltraitance reconnue comme telle. Et on le comprend ! La grillade dominicale en aurait sans doute un goût différent.
Pourtant les animaux qui sont abattus au Vigan ne sont pas élevés en batteries industrielles mais proviennent de petits élevages locaux de qualité.
Les images produites par L214 aux abattoirs du Vigan révèlent des scènes indiscutablement scandaleuses, dévoilant le sadisme d’un employé, appliqué à des animaux sans défense. Mais retirer la vie n’est pas chose si simple qu’il peut paraître et certainement bien des abattoirs, s’ils étaient filmés offrirait un triste spectacle. C’est d’ailleurs ce que cherche à démontrer L214.
L’abattoir du Vigan
Autre paradoxe, l’abattoir du Vigan répond à une demande locale de nombreux petits éleveurs qui ne sont pas obligés de trimbaler leurs animaux vers des abattoirs lointains et peuvent ainsi pratiquer le circuit court si cher aux environnementalistes.
Porté sur les fonds baptismaux par la communauté de communes du Pays viganais, il a longtemps connu des difficultés pour boucler son budget qui commençait tout juste en 2015 à atteindre un équilibre d’ailleurs très attendu par les contribuables de la collectivité !
Mais cet outil coûteux semble encore devoir recevoir des améliorations car la vidéo montre également certains dysfonctionnements matériels qui contribueraient à la maltraitance.
Le dérapage médiatisé par L214 est d’autant plus malvenu lorsque l’on sait les efforts déployés pour former le personnel et mettre aux normes européenne les installations. La certification "bien être animal" a été acquise à ce prix. Je préférerais pour ma part parler de "moindre souffrance animale" ce qui serait plus juste car un abattoir ne correspond pas vraiment à l’idée que l’on peut se faire du bien-être.
Des techniques d’abattage ont été mises au point afin que l’animal ne stresse pas et soit étourdi [1] avant d’être saigné. Encore faut-il les mettre en pratique correctement et systématiquement en utilisant un matériel qui soit parfaitement opérationnel. Ce n’était pas le cas aux abattoirs du Vigan. [2]
Le sale boulot
Bien sûr, après avoir vu ces images désolantes, on serait tenté d’inculper les responsables pour fausse déclaration en ce qui concerne le "bien-être" ! Pourtant il est vrai que cette certification a bien été mise en place et des formations sérieuses données au personnel.
Peu de gens aimeraient travailler dans un abattoir. Ceux qui sont chargés de le faire pour préparer les carcasses que nous consommerons plus tard soigneusement apprêtées par notre boucher ont un rôle difficile. Cela n’excuse pas les actes déviants ou barbares mais cela nous renvoie à l’image d’une société compartimentée où chacun doit exécuter son boulot quel qu’il soit. En pratiquant celui qui consiste à donner la mort au quotidien, certains peuvent éprouver des traumatismes ou au contraire devenir complètement insensibles à la souffrance animale.
Mais il y a une réalité sous chaque produit consommé ou vendu. Depuis que l’élevage existe on a abattu des bêtes pour les manger. Un jour sans doute consommerons-nous des viandes produites in-vitro à base de cellules souches reproductibles indéfiniment ? Adieu alors cochons, veaux, bœufs, poules et lapins qui seront passés au nombre des espèces anciennes disparues !
Mais pour l’instant, un bon gigot d’agneau... Ça ne tombe pas du ciel, n’en déplaise à L214.
Raison garder
Comment se garantir par la suite contre un nouvel épisode aussi désastreux que celui que nous venons de vivre ?
Il nous faut attendre les conclusions de l’enquête administrative avant d’aborder ce sujet. Et aussi que l’émotion et la passion de certains se calme un peu car elle ne sont pas toujours bonnes conseillères.
[1] Pistolet à tige perforante ou choc électrique
[2] L’étourdissement n’exclut pas la reprise de conscience de l’animal qui doit donc être saigné très rapidement pour ne pas souffrir. Si ce laps de temps court n’est pas respecté ou que l’étourdissement n’est pas correctement pratiqué l’animal, suspendu par une patte, peut donner des signes de reprise de conscience, signes avérés dans le cas d’Alès et du Vigan (à ne pas confondre avec des mouvements réflexes inconscients).