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Les tribulations d’un élu municipal

samedi 30 novembre 2019, par grand-Pierre

Au terme d’une mandature voici les états d’âme d’un élu municipal.

Élu une addiction ?

"Mais que vais-je bien pouvoir faire après ! J’assiste au moins chaque jour à trois réunions".

Cet élu de la commune voisine m’interpellait ainsi lors d’une énième réunion en se projetant dans l’après mandat et sa probable angoisse devant un agenda soudain devenu vide de tout rendez-vous. Finalement, il se représentera tout de même car il n’existe pas de limite d’âge en politique !

Si certains élus peuvent être assimilés, par leur parcours politique, à des professionnels faisant carrière, il n’en est pas de même des petits élus qui feront un tour ou deux sur le manège municipal puis retourneront à la vie quotidienne ordinaire du citoyen.

Eh bien me direz-vous, quel est le problème ? Un mandat électif, comme d’ailleurs un emplacement réservé sur le marché hebdomadaire, ne constitue pas en soi un acte de propriété. Ce n’est qu’un temps consacré par l’élu à sa ville, à son département ou à sa région. Un contrat à durée déterminée, sans plus, mais avec en prime une parcelle de pouvoir et l’accès à l’information. Vous me direz que certaines personnes deviendraient addictives pour moins que ça !

Il faut ajouter à ces privilèges l’appartenance au corps des élus ou le tutoiement est de règle et où, malgré les conflits internes, règne une certaine solidarité de classe.

Alors certains hésitent à descendre du manège à l’occasion d’un prochain scrutin. Ils souhaitent rempiler comme disent les militaires, non pas parce que la soupe est bonne, car elle ne l’est pas tant que cela, mais plutôt pour continuer d’exister dans leur rôle d’élu. Cela peut paraître paradoxal alors qu’en France une crise des vocations se développe, notamment chez les maires, dépossédés de leurs compétences au profit des EPCI et excédés par de nouvelles normes toujours plus prégnantes.

Créatifs ou simples gestionnaires

Les visionnaires sont rares mais ils existent. L’attachement fort à la commune également. La défense de certains intérêts aussi, c’est humain.

Mais c’est malheureusement la gestion qui prend le plus souvent le pas sur la vision. D’autant plus que nos territoires cévenols sont pauvres et que les temps sont durs ! Pourtant certains dossiers importants émergent malgré tout de cet océan de misère.

Ensuite, et après cette difficile émersion, une quirielle de réunions s’enchaînent ou vont pouvoir intervenir mille administrations différentes, toutes plus lentes les unes que les autres. Nous sommes donc en France... Les techniciens et les administratifs seront finalement aussi importants que les élus dans l’élaboration du dossier. Les temps administratifs et citoyens seront ainsi en décalage les uns avec les autres et les attentes de ces derniers souvent déçues.

Autre problème et de taille : Certaines responsabilités sont dévolues à des élus qualifiés par leur parcours professionnel ou leurs compétences acquises. Pour les autres, des décisions sont à prendre mais comment prendre la bonne si l’on n’est pas qualifié pour ce faire ? Trois solutions sont possibles :

  • Nommer une commission
  • Engager un cabinet d’expertise
  • Faire une connerie

Notez que dans les deux premiers cas le résultat n’est pas garanti car la commission peut se tromper et l’expert peut pratiquer des tarifs sans relation directe avec ses compétences... S’il fallait recenser dans l’hexagone le coût de tous ces projets mal pensés, mal fagotés, impossibles à gérer à l’équilibre faute de conceptualisation cohérente au départ, le trou de la sécu pourrait être comblé sans problème.

Un métier difficile

Ceci dit, et bien dit, les actions de nos collectivités, chers concitoyens, ne se résument heureusement pas qu’à cela. La volonté de servir le bien public et le développement économique reste néanmoins une préoccupation dominante chez les élus locaux. Un sacerdoce même pour quelques uns.

Il faut souligner que malgré quelques modestes privilèges le métier d’élu n’est que peu gratifiant. Vous n’êtes que très rarement remercié et plutôt souvent critiqué que ce soit par vos pairs ou vos administrés. Mais toute proportion devant être gardée, nous ne sommes tout de même pas à Dallas dans cet univers impitoyable ! De belles rencontres existent aussi et des amitiés se créent.

Lourdeur...

Malgré l’irruption de l’informatique dans les collectivités au cours de la décennie la réactivité de l’entreprise privée ne se retrouve pas dans le temps des collectivités locales (vous l’aurez constaté en lisant mon article). Le personnel territorial est également beaucoup plus protégé que dans le privé ce qui est une bonne chose certes, sauf dans certains cas cependant très rares d’incompétence ou de mauvaise volonté.

Notre pays, nos collectivités sont de vieilles dames qui n’apprécient pas d’être bousculées. Les règles, les normes, les décrets sont innombrables et les réunions à répétition... C’est le prix à payer pour un fonctionnement démocratique autant que républicain.

Un petit rafraîchissement des structures ne serait pourtant pas du luxe mais les tentatives de réorganisation territoriale (loi NOTRe) n’offrent pas à ma connaissance de résultats probants et le système peine à se réformer.

Glissement Vieillesse Technicité (GVT)

Enfin, les coûts de fonctionnement de nos collectivités ont tendance à toujours augmenter, même sans remplacer certains postes après départ à la retraite. C’est la raison de cet indice GVT qui fait progresser la masse salariale année après année.

En fait, et cela est valable pour de nombreux organismes, il est très difficile de s’auto-appliquer l’austérité lorsque les moyens diminuent. Certains ont recours à la création de taxes ou leur augmentation lorsque cela est possible plutôt que de réduire le coût des prestations fournies aux administrés. La tendance est au maintien en l’état du bloc communal ou intercommunal existant afin de ne priver personne de son poste.

Les charges externes augmentent également régulièrement (consommables - traitement des déchets etc.) ce qui fait que le malheureux contribuable contribue toujours plus pour des services équivalents voir même quelquefois en diminution.

Faut-il pour autant jeter la pierre aux élus ? Quelle est leur réelle marge de manœuvre ? Question pertinente.

Les budgets des collectivités sont abondés par les taxes et les dotations et subventions. L’autonomie de celles-ci en est d’autant plus limitée. Ensuite interviennent les affiliations politiques même si cela n’est écrit nulle part.

Ainsi vont cahin caha nos collectivités, à leur rythme et avec leurs incohérences ; avec leurs élus affûtés ou assoupis selon les cas et leur pratiques démocratiques affichées ou réelles.

Remises en cause par les mouvements alternatifs citoyens, elles n’en sont pas moins les seules représentatives par le fait de l’élection et à ce titre dépositaires du pouvoir de décision.

Néanmoins la mise en place de pratiques démocratiques nouvelles, incluant des comités citoyens dans un processus consultatif, serait souhaitable et cela même si la formule la plus performante reste encore à trouver.