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Péage à pied au Pont du Gard

lundi 27 mai 2013, par grand-Pierre

En 2013 l’EPCC qui gère le site du Pont du Gard a institué un péage pour les cyclistes et les piétons. Ambiance…

Chemins à l’encan

Je me souviens d’une certaine réunion à propos de tourisme et de randonnée à laquelle j’assistais il y a bien longtemps. Ne me demandez pas où ni avec qui, je ne m’en rappelle plus. Et c’est tant mieux.

Nous abordions les problèmes liés à l’entretien des itinéraires pédestres et des coûts que cela entrainait immanquablement pour les collectivités. L’un des participants entreprit alors d’argumenter en faveur de l’institution d’un péage qu’il souhaitait appliquer aux utilisateurs afin de couvrir ces frais. Pour ce monsieur, utilisateur devait rimer avec financeur. Même logique que pour les autoroutes. Je ne pense pas que la pratique de la marche à pied ait été son loisir favori.

Ce malheureux bonhomme confondait la fourniture d’une barquette de frites, à régler au forain, et l’aménagement du territoire et de son potentiel touristique. Il fut rapidement remis en place par les autres membres de l’assistance, choqués que l’on puisse seulement évoquer le principe du péage « à pied ». On doit pouvoir aller partout librement à pied. Mettre un pied devant l’autre est l’une des rares libertés qu’il nous reste !

Un site qui revient cher

Depuis, bien de l’eau a coulé sous le Pont du Gard et l’EPCC qui gère le site a unilatéralement décidé en 2013 de rendre le passage à pied et en cycle payant. Juste le droit de passer et de regarder, même pas une barquette de frites offerte ! Cela s’appelle une tarification abusive.

L’aménagement du site à couté deux fois le montant initialement prévu pour les travaux. La gestion, difficile car la fréquentation s’est révélée inférieure de moitié aux prévisions, a contraint la CCI à jeter l’éponge et par la suite l’EPCC a toujours respecté la philosophie d’Alain Journet, qui avait présidé à la création du site : La liberté d’accès, votée à l’unanimité par le conseil général de l’époque.

Quelle est la muse qui inspira cette décision aberrante du péage pédestre ? Combler un déficit ? En ces temps où l’austérité devient le paradigme absolu certains pensent qu’il est normal de racler les os du jambon tant qu’un morceau de chair y adhère encore…

La mauvaise réputation

Que le buzz sur la toile jusqu’à l’autre bout de la planète crie « au voleur » en citant le Pont du Gard et que les professionnels du tourisme qui vivent de l’attractivité que représente un site classé au patrimoine mondial de l’humanité s’insurgent, peu leur importe. Il faut racler et encore racler. Par ici la monnaie ! Les retombées désastreuses pour l’image du site et du département ne sont pas prises en compte.

De plus, un chemin de grande randonnée traverse le site et l’on voit mal comment faire la différence entre visiteurs et randonneurs si l’on ne souhaitait pas faire payer ces derniers ?

Réactions en chaine

Une pétition a d’ors et déjà réuni cinq mille signatures contre cette décision, disons le, parfaitement stupide. Pour la signer : http://www.pontdugard.org/

Une manifestation est aussi organisée le 8 juin à onze heures sur la rive droite.

Aqueduc ou pompe à fric ?

Ne revenons pas au temps des multiples octrois que les seigneurs locaux instituaient à tous les ponts pour décharger leurs contemporains de leurs pièces trébuchantes. Au point que le suzerain dut y mettre bon ordre au risque de voir les échanges de toutes sortes gravement handicapés par de telles pratiques. Mais les édiles actuelles montreront-elle la même sagesse que ce bon roi le fit jadis ?

Tout le monde a droit à l’erreur. Le reconnaître n’a rien de déshonorant.


Novembre 2014

Nous publions une newsletter sur le sujet (in extenso) :

Pont du Gard : le Conseil Général assume le scandale du « péage-piétons »

> Le pont du Gard était, jusqu’en 2000, d’accès entièrement libre et gratuit. C’était à la fois un objet de haute culture et un lieu de récréation familiale et populaire. En 1985, 15 ans avant la création du Site, le pont du Gard a été inscrit au Patrimoine Mondial de l’Humanité.

> Le Conseil Général a adopté à l’unanimité en 1997 un projet d’aménagement, accepté par la « société civile » au terme d’une concertation approfondie et après enquête publique, maintenant le principe du libre accès au pont du Gard, point absolument essentiel. Le Site du pont du Gard serait chargé de l’entretien du domaine autour du pont et de la gestion d’un ensemble immobilier comportant des parkings et des espaces culturels et commerciaux dont les recettes d’exploitation couvriraient les dépenses. L’utilisation des services serait facultative et individualisée.

> Ouvert en 2000, le Site du pont du Gard s’est révélé un terrible désastre économique. Le premier gestionnaire -la CCI du Gard- a jeté l’éponge pour éviter de sombrer corps et biens.
> En 2003 un établissement public, l’EPCC, lui a succédé. Il a vécu grâce à un niveau extrêmement élevé de subventions publiques -jusqu’à plus de 5 millions d’euros- « asséchant » le budget culturel du département.
> Devant l’impasse économique et budgétaire, le temps des expédients et du reniement des promesses a commencé :
> · Par une délibération du 24 novembre 2009, l’EPCC a incorporé le prix des entrées aux espaces culturels dans le prix des parkings, obligeant les automobilistes à acheter des services dont la plupart des visiteurs n’ont que faire.
> · Cela ne suffisait pas ! A partir d’avril 2013, l’EPCC a clôturé le domaine, pourtant d’accès libre et gratuit, et interdit aux piétons et cyclistes d’accéder au pont du Gard sans acheter les billets de musée. C’était enterrer définitivement le principe de l’accès libre et gratuit, sans même que le Conseil Général ait délibéré pour changer les règles du jeu !

> Le Site du pont du Gard est traversé par la route départementale 981. Faisant partie du domaine public, cette route doit rester libre de tout péage. L’illégalité du péage « piétons » n’a ému ni le conseil d’administration de l’EPCC ni le département ni l’Etat. Son annulation plus que probable a conduit le Conseil Général à agir… Pas dans le sens que nous attendions.
> Nous espérions que, pris de scrupules juridiques et d’un tardif souci d’honorer la parole donnée, le Conseil Général allait presser l’EPCC de supprimer le « péage piétons ». Erreur, le Conseil Général a, au contraire, choisi de déclasser la route départementale, ce qui donnera, pour l’avenir, une base légale au péage. Au-delà, la voie de la privatisation est ouverte.
> Une enquête publique a été prescrite ; elle commencera le 17 novembre en mairie de Remoulins. Nous ne saurions trop vous conseiller d’y participer pour dire NON au déclassement, et par conséquent NON au « péage piétons », soit en rencontrant le commissaire-enquêteur soit en lui adressant par courrier vos observations au commissaire enquêteur, M. Jacques ROUMANIE, en mairie de Remoulins ou de Vers (30210) avant le 8 décembre.

> Résumons-nous : il y a vingt ans, le pont était offert gratuitement à l’admiration de tous.
> 320 millions de francs d’investissements envolés et autant de subventions publiques dilapidées (au bas mot 50 millions d’euros employés à combler le déficit structurel du Site), le pont du Gard est toujours là, bien sûr. Pour les visiteurs, il faut désormais payer 18 euros pour le voir si l’on est automobiliste et 10 euros si l’on est piéton. Et en plus il faudrait dire merci ?

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