Le blog de Grand-Pierre

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Ca chauffe à Bobo !

Un témoignage exclusif sur le blog de GP en direct du Burkina faso

lundi 26 mai 2008, par grand-Pierre

Un témoin direct des évènements, de retour en France raconte. Nous publions son récit intégralement.

Ce récit est à mettre en parallèle avec notre article dans la même rubrique : "Routard : l’Afrique pour un dollar par jour".

Une marche pacifique doit avoir lieu à Bobo-dioulasso. Marche contre la vie chère, contre LA FAIM.

Le peuple n’a plus rien à manger. Les greniers à mil sont vides. Les sacs de mil, maïs et riz sont stockés. Ca spécule sur la famine à venir. Les prix ont TRIPLÉ et ce n’est pas fini.

Le peuple n’en peut plus, le peuple a FAIM !! Quand les gens ont faim, tout est possible.

La marche pacifique se transforme rapidement en émeute sanglante. Marche interdite par le gouvernement. Les "corps habillés" (flics - militaires) ont pour mission de disperser la foule avec des lacrymos et des kalatchnikov.

Nous sommes au palais de justice lorsque les premiers coups de feu se font entendre. Très vite, nous comprenons ce qui se passe à deux pas de nous. Les coups de feu retentissent de tous les coins de la ville.

Nous regagnons notre véhicule et nous essayons en vain de sortir de ce "merdier". Le centre ville : Un véritable piège à rats.

Les rues se ferment les unes derrière les autres. Derrière nous la foule bloque toutes les issues avec tout ce qui lui tombe sous la main.

Difficile de respirer, ils tirent des bombes lacrymo. Les gazs nous étouffent ; on se protège comme on peut. Ca tire dans tous les coins. Le peuple est déchainé, ça fait peur, terriblement peur.

La foule déferle dans les rues de Bobo. Le peuple à faim !! Il est prêt à tout on le sait bien.

On tente de sortir de cet enfer, des blocs de pierre barrent les rues. D’un coté la foule déchainée avec hachettes et pierres, de l’autre les "corps habillés" avec les kalatchnikov au poing. Commence pour nous une course folle pour sortir de cet enfer. On me dirige. On a du mal à respirer.
AK 47
Tu dois aller plus vite, plus vite. J’ai du mal à rassembler mes esprits. Par contre je sais qu’il faut vite trouver une issue. Je fonce. Les trottoirs, les pierres, les gens, la fumée, les coups de feu, les machettes, mon mari et moi. Vite, vite, ils arrivent.

Je vois la foule dans une rue parallèle à la notre. Ils foncent sur les flics qui ne maitrisent plus la situation et tirent à bout portant.

Je fonce, je tourne, je retourne, je passe les barrages et nous voilà sortis du centre ville.

Le peuple se dirige place de la nation. Notre course folle se termine dans Sargalao. Les émeutiers continuent place de la femme. Ils cassent tout sur leur passage. Les flics tirent, les machettes et les pierres volent et lapident. On parle d’une dizaine de morts. Mais en fait on n’en sait rien. Ca fait peur. Une peur qui te tenaille, qui s’accroche à toi et qui ne te lâche pas. Pas pour toi, pour eux, pour un monde qui devient fou.

Plus de deux cent personnes ont été arrêtées et se trouvent actuellement à plat-ventre, le visage dans la terre de la cour de la prison de Bolomakoté. Les mains liées dans le dos, ils y resteront plusieurs jours.

Ville morte durant plus de trois jours, l’armée à fait son apparition. Dans la ville il plane une ambiance des plus mortifère. Le ras le bol d’un peuple qui crève sous les yeux de ceux qui se remplissent les poches.

Le pays le plus pauvre du monde ou circulent des 4X4 à vous couper le souffle. Ce fric jeté à la face d’un peuple qui crève et personne ne semble s’en émouvoir.

Les "corps habillés" ont envahi la ville, tout est affaire de décor. Les "kalatch" pointent leurs canons juste sous notre nez. On navigue dans une réalité que beaucoup auraient du mal à imaginer. Burkin'art

Aujourd’hui, il semblerait (nous ne sommes pas sur place actuellement) que des manifs de ce type soient malheureusement toujours d’actualité. Ce qui est sur c’est que les gens ont toujours faim et que la situation est catastrophique ! Et franchement, qui s’en soucie ici ?

Merci de ne pas citer de nom, cela pourrait nous mettre en danger.

Messages

  • pendant ce temps là, chez nous en notre doux pays de France, la police est poussée à chasser le "crâne", c’est à dire le sans papiers (mais pas forcément sans travail ni sans enfants français)qui a émigré ici souvent pour survivre, tout simplement.

    y-aurait-il pas intérêt à se bouger un peu les amis ? ou bien cachons nous la tête dans le sable... mais alors gare à nos fesses !