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Internet et le petit commerce de proximité

mardi 26 mars 2013, par grand-Pierre

Le e-commerce va-t-il achever le petit commerçant déjà fragilisé de nos centre-ville ?

Après les grandes surfaces, de plus en plus nombreuses et surdimensionnées qui concurrencent les petits commerçants (et cela même le dimanche), le e-commerce gagne de jour en jour en influence et les cyber-consommateurs européens sont à présent des millions à acheter en ligne.

Commerce mondialisé

Les cyber-achats en EuropeLes effets conjugués de la mondialisation et de l’informatique ont fait émerger une nouvelle forme de vente : le e-commerce.

Celui-ci dispose d’arguments incontestables : Le choix des articles très étendu, les prix assez bas en général et des délais de livraison raccourcis. L’hexagone est devenu un vaste réseau de transport informatisé, avec ses plateformes de transit (hubs) et le suivi en temps réel (ou presque) des colis. Cela fait irrésistiblement penser au mode d’acheminement des courriels par petits "paquets" arrivant finalement sur nos messageries en bon ordre. Mais ces norias de poids-lourds fatiguent la voirie et produisent du CO² en quantité.

En s’appuyant sur ces réseaux, n’importe quelle entreprise peut vendre sur le net et même, pour certaines, aller jusqu’à ignorer le stockage en externalisant leurs livraisons. Avec un volume important à traiter elles parviennent ainsi à afficher des prix tout à fait concurrentiels.

Les petits peuvent-ils se défendre ?

Quelques commerçants [1] semblent à l’abri de cette concurrence. On imagine mal en effet le boulanger du quartier vendre ses baguettes sur le net et les faire livrer par Chronopost ! La jeune et charmante toiletteuse pour toutous ne risque pas grand-chose non plus. Mais les autres ? Tous les revendeurs détaillants.

Certains ont réagi rapidement en dotant leur magasin de détail d’un site e-commerce professionnel. En élargissant ainsi à la fois l’offre et la clientèle, [2] ils peuvent tenir des prix plus attractifs et maintenir un chiffre d’affaire suffisant. Cette formule concerne plutôt les magasins spécialisés suffisamment performants pour se lancer sur la toile.

Par contre les petits revendeurs de quartier ont peu de chance de pouvoir se maintenir tels quels car le service de proximité qu’ils offrent et la disponibilité des articles en magasin sont concurrencés par les livraisons très rapides des cyber-vendeurs. Il ne pourront jamais stocker autant d’articles que ceux présentés en grand nombre (présentés mais pas forcément en stock) sur les sites commerciaux. Et ils ne pourront pas non plus tenir des prix aussi compétitifs. Avec les charges fixes du magasin à payer et la crise économique qui paupérise la clientèle, il semble que leur avenir ne soit pas rose sur le moyen terme.

Des centre-ville sans commerces ?

Les consommateurs que nous sommes tous iront toujours vers la meilleure aubaine possible. Cette loi immuable de l’offre et de la demande comporte toutefois quelques exceptions : Par exemple des ruraux qui acceptent de payer le carburant plus cher pour soutenir le pompiste du coin. Mais cela ne fonctionne pas forcément sur la durée et le détaillant finit par jeter l’éponge. La municipalité pallie finalement à ce problème en installant une station service automatique !

On pourrait imaginer des guildes de détaillants pour ceux qui travaillent sur les mêmes produits. Celles-ci pourraient contracter sur des volumes importants ce qui ferait baisser les tarifs pour chacun. Encore faudrait-il que ces commerçants sachent se regrouper alors qu’ils fonctionnent habituellement sous une logique individuelle.

Combien de désillusions et de stress dans les arrières-boutiques de ces petits magasins ? Combien de clés mises sous la porte dans un avenir plus ou moins lointain ?

Les librairies sont un cas intéressant avec l’instauration d’un prix unique des ouvrages qui, de cette façon, ne souffrent pas de la concurrence et peuvent être commandés chez le libraire du coin au même prix qu’ailleurs. Les maisons d’édition ont du jouer le jeu et la chaine du produit est maitrisée ce qui n’est pas le cas dans d’autres secteurs.

Alors, les magasins de nos quartiers vont-ils se vider petit à petit et verrons nous d’autres occupants dans ces lieux dévolus depuis toujours aux petits commerces ? Possible, mais on a quand même du mal à se l’imaginer.

Les procureurs

Les transporteurs utilisent des "Point-relais", généralement situés chez un commerçant pour y déposer les colis vendus en ligne. En me rendant chez l’un d’eux chercher mes paquets, je ne pus repartir sans avoir entendu le discours, assez stigmatisant pour le consommateur, que me tint le maître des lieux. Négligeant toute réserve, ce dernier dévoila à la ronde le contenu de mes achats et se mit en devoir de me signaler où j’aurais pu me les procurer en ville ! Pas vraiment commerciale comme attitude.

Bon ; je ne lui en ai pas voulu. J’ai ressenti son stress devant l’implacable logique à l’œuvre qui risque de le mettre à la rue un des ces jours. Rien de rassurant en effet dans tout ça pour ce commerçant qui en veut.

Mais ce n’est pas le consommateur qui sauvera le petit commerce, même s’il était particulièrement instruit politiquement ou bien représentait le type parfait du militant à la conscience sociale solidement développée. Pour quelle raison payerait-on plus cher et en disposant d’un choix plus restreint une marchandise qui serait de toute façon livrée sous quarante-huit heures par les cyber-vendeurs ? Telle est la question !

C’est le petit commerce qui devra trouver les bonnes réponses pour survivre et convaincre ses clients potentiels en vendant plus et en margeant moins peut-être. En installant un site de commerce en ligne par exemple ? Mais surement pas en se posant en moralisateur. Ça ne paye plus hélas. [3]


Vous trouverez ci-dessous des commentaires. Celui de la commerçante désespérée interpelle énormément et va bien plus loin, par le retour d’expérience qui est détaillé, que ne le fait mon article. Je suis très heureux que mon blog puisse aussi servir à faire émerger la réalité, fut-elle désespérante pour cette personne qui, visiblement, ne s’est pas contentée de la déploration mais s’est battue, malheureusement sans trouver la solution au mal qui frappe les commerces de proximité. On peut constater à la lire, que le problème est sérieux et de jour en jour plus inquiétant. Je la remercie pour ce témoignage, qui en appellera peut-être d’autres, qui sait ? GP


[1Plutôt des artisans d’ailleurs

[2La zone de chalandise ne connait plus de limites !

[3A ce sujet me revient une anecdote : J’accompagnais à Nîmes un artisan photographe pour un rendez-vous chez un concessionnaire Renault. Le photographe plaidait pour que ce dernier fasse travailler sa petite entreprise locale et faisait appel à sa conscience de citoyen. Le directeur de l’agence Renault l’écouta avec bienveillance, puis au moment de se quitter lui demanda : Monsieur ...X..., dans quelle voiture roulez-vous ? Pas de chance, c’était une Toyota !

Messages

  • J’ai bien peur que vous ne mélangiez beaucoup de choses et que votre connaissance du e-commerce soit très superficielle. Le principe du commerce en ligne n’implique aucun lien direct avec la mondialisation et avec des commerçants de grande taille, comme vous le sous-entendez dans ce billet.

    En réalité les différences ne sont pas du tout là où vous les placez : il y a des e-commerçants éloignés et d’autres de proximité, il y en a de grande taille et d’autres de très petite. On peut même dire que la grande nouveauté du e-commerce c’est précisément le petit commerce en ligne !

    En ce qui concerne La Redoute, par exemple, que son catalogue vous arrive par la Poste (comme avant), ou bien que vous le consultiez en ligne (comme aujourd’hui), pouvez-vous me dire ce que ça change ?

    En revanche, que l’on puisse s’installer comme petit commerçant en ligne... en Lozère, et devenir très prospère ! ça c’est nouveau (voir l’exemple du site bienmanger.com). Quant au succès remarquable du site leboncoin.fr, il est très largement basé sur la vente... de proximité justement !

    • Bien. Pas de lien avec la mondialisation et les sites de grande taille, peut-être...

      Cela dit, la libéralisation des échanges et le développement très important des réseaux de transport sont bien quand même aujourd’hui un effet de la mondialisation qui amène jusqu’à notre porte tous les produits du monde.

      Mais ce que je retiendrais surtout de votre propos c’est que vous abondez dans un certain sens à ma conclusion : Le salut pour les petits commerces de proximité est sans doute possible grâce à la vente en ligne. C’est ce qui me semble important à retenir de cet échange.

      Je vous remercie pour votre commentaire (il n’y en a pas tant sur mon blog) et pour les précisions que vous avez apporté.

      GP

  • Bonjour, enfin un article sur les difficultés des commerces !

    Après avoir subi un licenciement économique, j’ai décidé, il y a 8 ans, de racheter un fonds de commerce existant depuis plus de 20 ans. Le C.A. était bon, il y avait beaucoup de frequentation. Tout allait bien ! Mais depuis 2 ans la situation a commencé à changer.
    Je tiens à dire que je pratique des prix bas, petite marge donc il me faut compenser par la quantité.

    De plus en plus fréquemment, j’ai commencé à avoir des clients qui venaient me poser plein de questions techniques sur les produits que je vends. Je prenais 1/2 heure pour leur répondre et ils partaient en me disant qu’ils allaient réfléchir mais je ne les revoyais jamais. Je ne comprenais pas, jusqu’au jour où l’un d’entre eux me dit ceci : je vous remercie beaucoup pour tous ces renseignements, je sais maintenant ce que je veux, je vais aller faire mon achat sur internet car il y a plus de choix que chez vous et les prix sont inférieurs de 10 euros.
    J’ai été stupéfaite et je n’ai rien pu lui répondre.
    Cela c’est depuis reproduit plusieurs fois, j’ai essayé la moralisation : disparition des magasins de proximité, licenciement des employés de ces magasins, perte des relations humaines, etc. Je n’ai reçu en contrepartie que des réactions d’indifférence. Alors j’ai arrêté.

    J’ai donc décidé de me battre en créant une page FB, un blog. Ce qui me prends énormément de temps. Quelques amis ayant le même type de magasin ont choisi d’investir dans un site internet : aucunes retombées si ce n’est celles de la perte d’argent et de temps.

    Entre temps je me suis rendue compte que mes fournisseurs avaient créé leurs sites internet de vente directe au public. Je ne peux donc plus m’aligner au niveau des prix.
    J’ai trouvé des fournisseurs qui me proposaient des prix intéressants si j’achètais en grande quantité mais je n’ai pas de place pour stocker.
    J’ai essayé de me regrouper avec d’autres détaillants mais ce que nous gagnons au niveau du prix d’achat nous le perdons en prix de transport (en effet dans ces cas là le fournisseur veut qu’il n’y ait qu’un seul lieu de livraison, il faut donc acheminer à nos frais la marchandise jusqu’à notre point de vente et cela coûte très cher).

    J’ai essayé d’étendre ma gamme de marchandises en proposant des nouveaux produits.
    J’ai essayé encore plein d’autres stratégies sans succès.

    J’ai 2 employés qui sont partis (l’un d’eux piquaient dans la caisse : j’ai du le licencier, l’autre a des problèmes personnels) en l’espace de 3 semaines. Je ne peux pas les remplacer, je ne me paie même plus depuis quelques mois.

    Je n’ai pas pris de vacances depuis presqu’un an, j’ai pris un long week-end-end de 3 jours, je travaille tous les jours y compris les jours fériés (non c’est faux, je me suis accordée le 25 décembre et le 1er janvier), assez souvent tard dans la soirée (quelques fois jusqu’à 3 heures du matin). Je ne vis plus que pour ça, je n’ai plus de vie sociale : je n’ai pas le temps, plus d’énergie et je suis épuisée.

    Alors que dois-je faire ? Mon commerce est invendable. Je fais une cessation d’activités tant que j’ai encore de la trésorerie ? Je continue jusqu’au dépôt de bilan ?
    Et après je fais quoi ? J’ai 55 ans, je dois encore travailler au moins 7 ans. En tant que T.N.S. Je n’ai pas le droit au chômage et de toutes façons pour moi ce n’est pas la solution, je ne supporte pas l’assistanat.

    Je sais que je ne suis pas la seule dans ce cas mais cela ne me console pas, ni ne me donne de solution.

    Inutile de dire que je suis très pessimiste quant à l’avenir des commerces de proximité.
    Vivement les centres villes déserts avec 1 boulanger, 1 boucher, 5 agences bancaires, 4 agences immobilières, 3 agences d’assurance.
    Alors chacun restera chez soi à faire ses courses sur internet, à parler avec ses amis virtuels, à travailler depuis chez lui sur son ordi pour faire vivre son site de ventes sur internet !

    Merci d’avoir publier cet article et de m’avoir laissé la possibilité de "vider mon sac".
    Désolée d’avoir été si longue.

    Merci d’avance à ceux qui voudront bien me donner des conseils.